L’enfant surdoué, l’envers du décor

(11/02-2014) – Un enfant surdoué, un enfant avec un haut quotient intellectuel, est loin, très loin d’être heureux dans la société d’aujourd’hui, où il vaut mieux être sous-doué plutôt que surdoué.

En France, aujourd’hui, et dans les pays occidentaux en général, un quotient intellectuel élevé est considéré comme positif, à la base.

Avant de continuer, j’aimerais mettre l’accent sur l’utilisation du mot ‘intelligence’. Dans cet article, « intelligence » couvrira la faculté de comprendre, d’apprendre, de se souvenir et de rapprocher des informations lorsqu’un nouveau problème se pose.

En gros, ce sera d’avoir la capacité, en plus de celle d’apprendre, de se souvenir et de comprendre, de savoir réutiliser l’information, également dans des situations qui n’ont rien à voir avec la situation originale. Donc une certaine dose de créativité également. Il est erroné de croire que les gens intelligents ne sont pas créatifs.

Notez également que la définition à laquelle je me rallie n’est pas gravée dans le marbre et qu’on discute toujours la définition exacte de l’intelligence.

Être intelligent, ne veux pas dire la même chose que « savoir beaucoup », mais il est exact que des personnes possédant cette faculté peuvent plus facilement contenir plus de savoir. Ils apprennent plus facilement, se souviennent plus facilement et donc, logiquement acquièrent le savoir, et le restituent, plus facilement.

On pourrait donc croire que les enfants ayant un quotient intellectuel élevé (les enfants surdoués) sont privilégiés…

Pas du tout !

Au jardin d’enfants et à la maternelle, ces enfants sont assez renfermés et sont souvent définis comme étant égoïstes.

Il peut être difficile à l’enfant surdoué de s’acclimater, car il va très vite maîtriser ce qui l’intéresse et de là il veut rapidement aller de l’avant. Tout comme la plupart des enfants, en somme.

Très souvent, il réclamera beaucoup de contact avec les adultes, car il ressentira que les adultes sont capables de satisfaire ses besoins bien mieux que les camarades. Mais les enseignants n’ont pas le temps et sont souvent occupés à ceux qui ont des difficultés d’apprentissage ou de conduite, et seront donc  rarement capables de satisfaire ce besoin.

De par ce principe, l’enfant surdoué risque fort de développer des troubles du comportement.

À l’école, l’enfant surdoué tombera souvent dans la même zone grise : l’enfant comprendra très vite les choses qui l’intéressent et il s’ennuiera mortellement le reste du temps… Et que fait-on lorsqu’on s’ennuie ?

Exactement ! On fait du tapage, on devient caractériel, on donne l’impression d’être un petit égocentrique et on devient vite un « enfant à problèmes »…

Dans d’autres cas, l’enfant recherchera des camarades plus âgés, deux ou cinq ans plus âgés, et ceci posera également des problèmes. L’enfant pourra penser aussi vite qu’eux, peut-être même des fois plus vite, mais il sera toujours plus jeune, plus naïf et sera souvent considéré comme énervant, pot de colle ou gênant, il risquera alors de se faire exploiter ou chicaner.

Dans d’autres cas, ou en même temps que les deux cas nommés ci-dessus, l’enfant peut prendre ses matières à cœur et poser beaucoup de questions au professeur, il sera zélé et appliqué… Peut-être même trop zélé, et il risquera dans ce cas aussi, d’être considéré comme un petit égoïste et un fayot… Et s’attirer les foudres de ses petits camarades moins zélés, et même de certains enseignants.

Dans la plupart des cas, l’enfant aura des problèmes d’adaptation. Il risque rapidement d’être accusé de « se la jouer ».

Et cela peut rapidement poser problème aux parents.

Comment réagiraient les enseignants si des parents venaient et diraient : « – Notre enfant est très intelligent, il faut le motiver plus que les autres et faire plus attention à lui »… La règle qui prescrit : « Ne te la joue pas » entre en vigueur ! Et les parents se feront vite rembarrer. Ils s’entendront dire que « tous les enfants sont intelligents », qu’il y a « sept formes d’intelligence » (ou huit, tout dépend de la théorie que l’on suit), et le pauvre gosse risque fort de voir venir des temps difficiles.

Ce problème ne serait pas si l’enfant avait été retardé. Si les parents viennent trouver l’enseignant et lui disent que leur enfant a un problème de concentration, d’apprentissage, qu’il ne comprend que lentement et qu’il aura besoin d’un petit peu plus de patience de la part de ses camarades et des enseignants… le problème se posera moins (il risque toujours d’exister, mais à bien moindre échelle).

Cette situation est une situation à laquelle il faut être attentif, sinon l’enfant va se sentir blessé, mal compris, indésirable et il risque de causer des problèmes afin d’être vu ou bien il peut devenir renfermé et « bizarre », mais dans les deux cas, il sera un échec.

Dans mon travail  de thérapeute cognitif, je n’ai pas pu éviter de remarquer le nombre de gens très intelligents qui sont incapables de penser de manière constructive. Bien au contraire, l’autodestruction donne l’impression d’être leur moteur. Toujours hantés par les fantômes du passé, ils répètent indéfiniment ce comportement et n’avancent pas. Ce qui est bien dommage… Il est important de dépasser cela.

Il est étonnant de penser que dans une société ou l’intelligence se cote tellement haut que cela en est un cadeau, autant de personnes se perdent sur le chemin de l’enfance. (Cyril Malka)

© 1996 – 2014 –  Cyril Malka – Adapté d’un texte danois publié dans « Berlingske Tidende » (17 juillet 1996) – « Vi Forældre » (décembre 1996), « Skolen » (août 1997) et « Forum Mentum » (le mensuel de Mensa-Danmark – Club des surdoués danois – avril 1999)

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