(14/05-2019) – L’angoisse est un des maux les plus courants aujourd’hui. L’angoisse se différencie de la peur, car elle n’a, apparemment, pas d’objet précis. On a peur des chiens, des araignées ou des réactions des autres, mais l’angoisse donne souvent l’impression de nous tomber dessus sans raison apparente.
En fait, l’angoissé a peur d’avoir peur. C’est l’angoisse de l’angoisse. C’est un principe logique lorsqu’on s’en aperçoit, mais il est pourtant, très mal compris.
L’angoisse de l’angoisse peut nous tomber dessus lorsqu’on est confronté à une peur plus ou moins bien définie, par exemple lorsqu’on fait ses courses, lorsqu’on est dans un ascenseur, lorsqu’on conduit une voiture ou tout simplement lorsqu’on est à la maison.
En ressentant cette angoisse (problème numéro 1), on commence à avoir une angoisse de ressentir cette angoisse (problème numéro 2).
Cette double situation est le point de départ du déroulement d’un cercle vicieux que j’ai nommé « le cercle vicieux de l’angoisse », duquel il est très difficile de sortir.
Lorsqu’on comprend ce processus, on fait le premier pas vers la solution du problème. Regardons ce cercle vicieux de plus près, si vous le voulez bien.
Lorsqu’on connaît l’angoisse « sans raison », on devient angoissé par peur de revivre cette angoisse. On pense quelque chose du genre « – ce serait insupportable si je revivais cette angoisse ».
Et rien que le fait de penser de cette façon mène à l’angoisse.
Cette angoisse arrive et on pense alors quelque chose comme : « – Mon Dieu! Ça y est! Je suis en train de devenir angoissé! », qui mène vers une pensée comme : « – Oh! Ça y est! Je suis en train de perdre le contrôle! Qu’est-ce qui va se passer maintenant si je m’évanouis (ou si je panique, si j’ai une attaque cardiaque, si je fais quelque chose d’insensé) ; ce serait horrible! »
L’angoisse augmente, ce qui favorise plus de pensées angoissantes et la roue tourne.
Ce phénomène que j’ai décomposé ici est extrêmement rapide et généralement on n’a pas le temps de saisir les pensées. On a juste le temps de comprendre qu’on est en train de paniquer.
On peut faire partie de ces personnes qui font de l’hyperventilation lorsqu’elles sont angoissées. Cela veut dire que l’on aspire trop d’oxygène et que, paradoxalement, on ressent qu’on a besoin de plus d’air, alors que c’est le contraire.
Les symptômes de l’hyperventilation sont des picotements (surtout dans les extrémités), on se sent pris de vertige, le cœur bat vite et on peut aller jusqu’à l’évanouissement. Si on ne sait pas ce qu’est l’hyperventilation, on peut donc croire qu’on est en présence d’une situation menaçante qui risque de mal finir et que la situation qui a mené à cela est vraiment horrible.
Rien que d’y penser mène à encore plus d’angoisse et le cercle vicieux continue.
Si on ne se disait pas quelque chose du genre « ça serait horrible, si… », la panique n’existerait sûrement pas, même si on a une tendance à faire de l’hyperventilation.
Il faut donc identifier le point de vue angoissant et le changer si on veut commencer à faire tourner la spirale dans l’autre sens.
Très peu de personnes comprennent cela et c’est la raison pour laquelle cette explication n’est pas très connue. On préfère éviter les situations où on risque l’angoisse. Mais vu qu’on a une angoisse de l’angoisse, la situation concrète en elle-même est moins importante. Il suffit que la pensée, même inconsciente, comme « pourvu que… » vous traverse l’esprit, pour que tout redémarre. C’est ce qui donne l’impression d’avoir des angoisses sur tout et n’importe quoi.
Si on ne peut pas éviter la situation angoissante, on préfère utiliser une méthode de distraction, afin de tromper l’angoisse. Ceci peut être, par exemple, compter jusqu’à dix, faire des exercices relaxants, prendre des médicaments, boire de l’alcool…
Ces méthodes peuvent avoir un effet à courte échéance, mais elles ne règlent pas le problème et le fait d’utiliser des médicaments, ou surtout de l’alcool, pour se donner du courage peut avoir des résultats désastreux à long terme.
Alors, c’est bien joli tout ça, mais que faire? En gros, beaucoup de gens vont travailler l’angoisse de la situation précise (d’entrer dans un ascenseur, par exemple) et ne pas penser à travailler l’angoisse de l’angoisse.
Souvenez-vous que ce qui mène à la panique, ce n’est pas l’angoisse de la situation (par exemple entrer dans un ascenseur), mais c’est le fait de se dire des choses comme: « Je vais peut-être m’évanouir, je risque de crier ou de pleurer et les gens vont se moquer de moi et je serais ridicule… ».
C’est donc l’angoisse de l’angoisse qui est le problème et c’est celui-là qu’il faut gérer en premier. Seulement après, on pourra travailler sur l’angoisse du tapis roulant, de l’ascenseur ou autre.
Donc il va falloir commencer par se concentrer sur l’angoisse de l’angoisse en premier lieu.
Ensuite, il faut apprendre à faire la différence entre le sentiment que quelque chose est « désagréable » et que quelque chose est « insupportable ». « Insupportable » ne représente ni plus ni moins que la fin du monde.
L’angoisse n’est pas la fin du monde. Elle est désagréable. De temps à autre, elle peut être extrêmement désagréable, mais elle n’est en aucun cas insupportable, terrifiante ou atroce, à moins qu’on ne la perçoive comme telle!
Si on décrit l’angoisse comme « insupportable », on refera une balade dans le cercle vicieux.
La première chose à faire est de se prouver, de se dire et de se convaincre que l’angoisse, la peur, est désagréable ou gênante, mais qu’elle n’est pas dangereuse et, en aucun cas qu’elle est la fin du monde.
Deuxième chose, il s’agit de se convaincre de cela lorsqu’on est dans la situation de laquelle on aimerait fuir.
Cela a l’air simple et c’est simple! C’est même très simple, mais ce n’est pas facile! Souvenez-vous de la différence, elle est importante.
On s’est entraîné, des fois pendant plusieurs années, à ressentir l’angoisse comme insupportable, et le corps réagit rapidement à cette définition, maintenant devenue habituelle. Cela prendra donc du temps à apprendre à voir l’angoisse comme désagréable, mais pas comme la fin du monde. Ça prendra aussi du temps, une fois que l’on a appris à voir l’angoisse comme seulement désagréable, de le faire comprendre au reste du corps.
Il vous faut donc défier l’angoisse sans vous laisser être submergé.
C’est-à-dire qu’il vous faut vous mettre dans ces situations, les défier, afin d’apprendre à les gérer. Néanmoins, si vous ressentez qu’une situation est trop écrasante, il est peut-être trop tôt pour l’attaquer. Ceci ne veut pas dire que vous ne devez vous attaquer qu’à des situations qui ne vous effraient pas! Trouvez le juste milieu.
Vaincre l’angoisse veut aussi dire tolérer le désagréable. Il est important de l’accepter et de regarder ce qui est désagréable en face plutôt qu’essayer de le fuir.
Au départ, il serait donc bon de s’attaquer à une expérience qu’on voit comme un défi.
Si cela rate, souvenez-vous que c’est « pas de chance »», et non « un échec ».
Continuez à utiliser le principe du défi sans vous laisser submerger. Trouvez une situation qui pourrait être un défi et défiez-la tout en pensant que « l’angoisse est vachement désagréable, mais elle n’est pas insupportable ».
Si vous commencez à ressentir de la panique, n’oubliez pas que la panique est de courte durée, même si elle paraît longue lorsqu’on est dans la situation. Utilisez la même méthode envers la panique : « Si je panique, je panique! Basta! C’est pas de chance, c’est désagréable, mais ce n’est pas insupportable! »
Il y a une chose importante dont beaucoup de patients m’ont parlé comme étant une chose essentielle de ce cercle vicieux.
Il s’agit de la peur d’agir de manière stupide ou absurde dans une situation angoissante ou sous l’emprise de la panique. Ils ont peur que les autres se moquent d’eux lors d’une crise.
Avant tout, commencez par vous dire qu’il est assez invraisemblable que cela arrive. Vous serez surpris de savoir, au cas où quelqu’un venait à remarquer votre comportement, que la plupart des gens ne se moquent pas de ce genre de chose et au contraire, risquent même de venir vous aider.
Alors, travaillez à vous imaginer ce qui arriverait dans ce cas et exercez-vous à avoir une attitude « anti-angoisse ». Si on a peur d’être la risée des autres, c’est parce qu’on se dit que si on agit de façon stupide et irrationnelle, cela veut dire qu’on ne vaut rien et qu’on est inutile, stupide, une pauvre cloche ou toute autre définition qui n’aura que l’utilité de nous rabaisser.
Si vous pensez au cas inverse. Par exemple, si vous voyez une personne avoir une crise d’angoisse. Vous moquerez-vous d’elle?
Non, bien entendu.
Alors pourquoi est-ce que les autres personnes devraient agir autrement?
S’il devait se trouver dans le lot une personne que vous ne connaissez pas, que vous n’avez jamais vue et que vous ne reverrez le plus probablement jamais et que cette personne se moquait de vous… Alors quoi?
Cela ne vous blesse pas. Cela ne vous frappe pas. Cela ne vous tue pas. Et cela ne dit absolument rien de vous. Le problème est si vous croyez que ‘les autres’ ont un pouvoir magique et que s’ils vous trouvent ridicule, alors vous le devenez. S’ils vous traitent d’idiot, alors vous l’êtes? S’ils vous traitent d’éléphant, alors vous devenez un éléphant?
Bien sûr que non. Encore une fois, c’est votre attitude envers vous-même qui est le problème et pas ce que les autres disent ou font.
Ce qu’on doit se demander dans ce cas est : est-ce que je suis inutile (stupide, etc.) juste parce que j’agis de cette manière ou est-ce que je suis un être faillible (comme les autres) et qui a un problème?
J’espère bien que vous constaterez que la réponse est la deuxième phrase!
Si un bon ami agit de manière absurde en public, allez-vous vous moquer de lui ou allez-vous prendre une attitude compréhensive envers cet ami? La réponse la plus probable est que vous allez accepter la manière d’agir de votre ami. Il est humain, tout comme vous.
On peut donc s’exercer en ayant une attitude tout aussi compréhensive envers soi-même : ça serait ennuyeux si j’agis de manière stupide, mais ce n’est pas une catastrophe. Je suis un humain faillible avec au moins un problème, tout comme tous les autres humains faillibles du globe.
Si on a une tendance à faire de l’hyperventilation, il est important d’apprendre à contrôler sa respiration. Cela demande de l’entraînement et le mieux est de le faire sous supervision.
Contrôler sa respiration veut dire que l’on aspire l’air dans ses poumons en souffles lents, réguliers et assez faibles (pas trop profondément). Inspirez par le nez et expirez par la bouche dans un rythme régulier.
Douze cycles par minute est une bonne moyenne et c’est le plus commun, mais mieux vaut trouver son propre rythme.
Ces cycles régularisent la quantité d’oxygène qu’on inspire et on ne ressent pas les picotements, on ne ressent pas les battements de cœur et le vertige qui sont les signes de l’hyperventilation.
Utiliser cet état d’esprit anti-angoisse et ces techniques, comme le contrôle de la respiration, demandent de l’entraînement, mais généralement on avance assez bien (quoique vous devez accepter quelques pas en arrière de temps à autre). Si vous suivez ces conseils, vous pourrez vous-même vous échapper de ce cercle vicieux qu’est l’angoisse. (Cyril Malka)
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