Sociopathe, psychopathe ou pervers narcissique?

(01/09-2015) – « C’est quoi la différence entre un sociopathe et un pervers narcissique ? »

Voilà une question que j’entends souvent. De même on peut, de par le net, trouver une foule de pages qui vous expliquent la différence entre le sociopathe et le psychopathe.

Mais le problème, c’est qu’elles disent souvent des choses différentes, ces pages.

Alors la différence, c’est quoi exactement?

Il y a deux réponses à cette question. Une réponse courte et une réponse longue.

Prenons d’abord la réponse courte: il n’y a aucune différence. Ces trois mots, sociopathe, psychopathe et pervers narcissiques sont synonymes.

Passons maintenant à la réponse longue.

Le premier terme a être apparu est le terme de psychopathe. Il est apparu au XIX siècle et on y trouve un peu de tout, car on y mettait des patients ayant des comportements impulsifs et autodestructeurs sans trouble du raisonnement. Ce qui pouvait quand même toucher une bonne partie de la population.

Environ cent ans plus tard, en 1909, Karl Birnbaum, un neuropsychiatre allemand, a introduit le terme « sociopathe », car pour lui, ce comportement antisocial avait surtout des causes sociales. Le terme a eu un certain succès outre-Atlantique et il était largement utilisé aux États-Unis dans les années 1920 et 1930 afin d’indiquer que ce qui définissait le plus cette forme de personnalité était un manque qui faisait que l’individu n’avait pas la capacité d’adhérer aux normes sociales qui, entre autres, l'empêchait de faire mal aux autres.

Mais en fait, déjà à cette époque, les termes sociopathe et psychopathe étaient synonymes, on mettait surtout l’accent sur le côté biologique pour certains ou sur les problèmes de socialisation pour les autres. C’est un peu toujours la tendance aujourd’hui. Mais seulement une tendance. C’est loin d’être une règle.

Certains psys préfèrent utiliser « psychopathe », car cela indique un problème de personnalité inhérent à la Psychée et d’autres préfèrent utiliser « sociopathe » pour indiquer le caractère social du problème. En gros la sociopathie s’expliquerait par l’environnement social alors que la psychopathie s’expliquerait par un mélange de facteurs psychologiques, biologiques, génétiques et environnementaux.

Encore une fois, ce n’est pas une règle, mais certains font cette différence.

Le choix du terme n’est donc pas descriptif, mais plutôt dépendant des raisons qui seraient originaires du trouble.

Depuis 1994, la définition officielle est « trouble de la personnalité antisociale » et les termes de « sociopathe » et « psychopathe » renvoient à cette définition dans le dictionnaire de l’APA (American Psychological Association).

Mais bon, il faut avouer que les mots « psychopathe » ou « sociopathe » sont plus faciles à utiliser que « personne qui souffre de trouble de la personnalité antisociale »!

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Alors quid du « pervers narcissique » ou du « PN » comme certains disent?

Il s’agit ici aussi d’un synonyme qui a été introduit par Paul-Claude Racamier en 1986 dans « Entre agonie psychique, déni psychotique et perversion narcissique ».

Dans ses livres suivants, Racamier explique qu’il tire cette expression de la théorisation psychanalytique qui relie les points de vue de Freud sur la sexualité et sur le narcissisme.

D’après lui, la perversion narcissique est « une organisation durable caractérisée par la capacité à se mettre à l’abri des conflits internes, et en particulier du deuil, en se faisant valoir au détriment d’un objet manipulé comme un ustensile ou un faire-valoir ».

Ici aussi, il ne s’agit donc pas de donner une autre définition de la sociopathie, mais tout simplement de lui donner une autre origine.

La France étant, avec l’Argentine, le seul pays au monde dans lequel on utilise toujours la psychanalyse, il était hors de question d’utiliser un terme venant des États-Unis et un terme freudien était le bienvenu. Les Français étant friands de sigles (qu’est-ce que j’ai galéré avec ces sigles lorsque nous habitions en France!) l’expression « PN » a vite eu beaucoup de succès.

Lorsque je travaillais à l’hôpital comme aide-soignant au Danemark, PN était l’expression que nous écrivions sur le cardex ou sur le journal du patient pour « Pro Necessita » (au besoin). S’il y avait écrit par exemple: Paracetamol PN, cela voulait dire que si le patient avait besoin ou demandait, on pouvait lui donner du Paracétamol sans demander au médecin. Et, je sais, c’est bête, mais c’est toujours la première chose à laquelle je pense lorsque je lis ou lorsque j’entends quelqu’un utiliser l’expression « PN ».

Pour conclure: non, il n’y a donc pas de différence descriptive entre un sociopathe, un psychopathe ou un pervers narcissique. Au mieux, il peut y avoir une différence de compréhension des causes. Mais dans la plupart des cas, il peut tout simplement s’agir d’une vieille habitude ou d’un terme qu’on trouve plus adapté que les autres.

Personnellement, je préfère utiliser le terme « sociopathe ». Non pas, car je crois aux raisons sociales de la personnalité — loin de là! –, mais afin d’éviter la confusion faite par beaucoup entre « psychopathe » et « psychotique ». Je ne considère pas l’expression « pervers narcissique » comme scientifique ou sérieuse et je ne l’utilise donc pas. (Cyril Malka)

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